Detalles

Saint Michel de Cuxa

Codalet

L'abbaye de Cuxa tire son origine de l'abbaye de Saint-André d'Eixalada, située plus haut dans la vallée de Têt, et fondée vers 840. À l'automne 878, une crue terrible détruisit le monastère et contraignit les moines à se réfugier ailleurs. La communauté se transféra à Cuxa, où se trouvait une église dédiée à saint Germain, propriété du prêtre Protais (Protasius) qui s'était, avec quelques compagnons, agrégé à la communauté peu d'années auparavant. Protais devint l'abbé du nouveau monastère en 879. À son nouvel emplacement, l'abbaye continua de bénéficier de la protection des comtes de Cerdagne-Conflent. Dans les années 940, une nouvelle église dédiée à Saint-Michel est construite. Mais à partir de 956, on rebâtit l'édifice plus somptueusement, et l'autel majeur est consacré le 30 septembre 974, sous l'abbatiat de Garin (Warinus), moine venu de Cluny et placé à la tête de cinq abbayes méridionales. Cette église subsiste toujours aujourd'hui, l'un des plus importantes églises pré-romanes encore debout. Garin, impliqué dans la grande politique de l'époque, provoquera la retraite à Cuxa du Doge de Venise Pierre Orseolo, qui abdique en 978, et mourra à l'abbaye en odeur de sainteté en 987. En 1008, c'est le petit-fils du comte Seniofred, Oliba, qui est élu abbé de Ripoll et de Cuxa. Il sera aussi évêque de Vic en 1017. Il va profondément transformer l'abbaye en construisant au-devant de l'église les deux chapelles superposées de la Crêche (Pessebre) et de la Trinité, qui communiquent avec Saint-Michel par des galeries. Il augmente aussi le sanctuaire de trois absides, voûte les bas-côtés de la nef, construit les clochers. C'est un homme de grand prestige, qui s'est rendu au moins deux fois à Rome, et qui a proclamé la Trêve de Dieu dans le diocèse d'Elne en 1026. Il meurt à Cuxa en 1046. En 1091, le comte Guillaume de Cerdagne donne l'abbaye de Cuxa à Saint-Victor de Marseille et à son abbé Richard (Archives départementales des Bouches-du-Rhône, 1 H 62 n° 297). Au début du XIIe siècle, on reconstruit le cloître en lui donnant la forme d'une colonnade de marbre, avec des chapiteaux sculptés. On édifie aussi une tribune en marbre dans l'église. Ces travaux sont l'oeuvre de l'abbé Grégoire, qui est élu archevêque de Tarragone en 1136. Les périodes suivantes du Moyen Âge sont moins fastes pour Cuxa. Les bâtiments du l'abbaye ne sont pas renouvelés. La richesse du monastère est cependant évidente, avec un domaine foncier très important, et une juridiction « quasi-épiscopale » sur une quinzaine de paroisses réparties entre les diocèses d'Elne et d'Urgell. En 1913, un sculpteur américain, George Grey Barnard, qui a déjà acquis quelques sculptures de Cuxa chez un antiquaire parisien, se rend sur place, et en acquiert beaucoup d'autres disséminés dans le pays. Ces achats sont à l'origine de la reconstitution du cloître au Cloisters Museum de New York. Barnard n'a pu, cependant, emporter la série qui était devenue l'ornement de l'établissement de bains de Prades, pour la conservation desquels la population locale s'est mobilisée lors de son passage : les ayant acquis, il en fit don à la France, et ces chapiteaux furent utilisés pour la reconstruction de la moitié du cloître en 1955.

Photo de 1 to all